« Mon patelin est situé dans un pays pauvre, en moyenne région : grimpez un peu, et vous arriverez à Chu. Vrai, on dit qu'ici les chiens rongent des cailloux et les poules picorent du gravier. Et les gens ? Demandezvous, qu'est-ce qu'ils mangent ? Qu'importe ce qu'on mange, du moment qu'on a le ventre plein. » Un oncle invalide qui se croit poète, des parents misérables paysans, des enfants dont le triste avenir semble tout tracé : Thiêp nous fait comprendre comme personne ce qu'est la vie quotidienne d'un Viêt-nam bien loin des paillettes touristiques.
Avec cette anthologie, nous plongeons dans l'histoire de la vie au Vietnam depuis un demi-siècle. à travers ces textes défilent le monde traditionnel, la colonisation, les guerres, le communisme, la nouvelle société de consommation... Nguyên Huy Thiêp a, au fil des années, écrit une oeuvre unique, qui nous raconte son pays sous toutes ses formes. Il a su le faire par le biais d'histoires dont les thèmes sont universels : l'amour, la haine, la violence, la maladie, la famille, la mort... Porté par une belle écriture et un esprit à la curiosité passionnée, ce livre est une vraie perle ! Cette anthologie reprend toutes les nouvelles parues dans les recueils déjà publiés par les éditions de l'Aube, à savoir Un général à la retraite (1990), Le Coeur du tigre (1993), La Vengeance du loup (1997), Conte d'amour un soir de pluie (1999), L'Or et le feu (2002), Mon Oncle Hoat (2008) et Mademoiselle Sinh (2010). Par ailleurs, quatre nouvelles inédites sont à signaler.
Dans ce recueil de nouvelles, Nguyên Huy Thiêp nous offre un kaléidoscope de son immense talent ! Recourant à la métaphore historique comme à l'observation la plus aiguë de la société vietnamienne contemporaine, il décortique sans complaisance les mécanismes humains dans des textes presque atemporels : la pauvre petite Sinh, orpheline, sera enlevée par un merveilleux prince charmant ; le chef d'un village contaminé par les sauterelles retrouvera la buccine dont les accords foudroient les cruels insectes ; une célèbre poétesse du XVIIIe siècle consommera trois amants entre rire et larmes... Ce faisant, l'écrivain fait oeuvre politique, même s'il s'en défend derrière un sourire malicieux.
"Bac Ky Sinh chantait avec simplicité, comme on parle. Je n'ai jamais entendu quelqu'un chanter de cette façon : sans artifice et sans effort, d'une voix indiciblement douce quand il s'agissait de souligner le sens d'un mot ou de faire vibrer une note ; une voix qui raconte sans trémolos et sans apitoiement les meurtrissures du coeur, les incertitudes de l'âme, où s'exhalent tour à tour la plainte de la solitude et l'impatience du désir ; une voix pleine, sans cesse sur le point de se briser telle une eau dans un récipient trop étroit, une voix d'où les mots tombent comme du miel." Comment mieux définir le style unique de Nguyên Huy Thiêp, qui nous raconte la force et la beauté des petites gens, ceux qui se débattent sans fléchir dans un monde luxuriant, certes, mais souvent si hostile...
" Il n'est rien peut-être de plus vietnamien dans l'esprit que la souplesse d'écriture de cet écrivain qui sait alterner langage cru et métaphore afin d'exprimer l'exil intérieur d'un être broyé par des années de boue et de plomb. " Philippe Franchini, l'Express.
" C'est la vie quotidienne de son pays que raconte Nguyên Huy Thiêp dans le Coeur du tigre, mais il y est aussi beaucoup question de légèndes : elles brillent comme un tapis de chrysanthèmes sauvages sur une terre recouverte de larmes et de cendres. " André Clavel, l'Événement du jeudi.
" Nguyên Huy Thiêp, le plus grand écrivain vietnamien d'aujourd'hui " Jean-Pierre Han, la Croix
« Mon patelin est situé dans un pays pauvre, en moyenne région : grimpez un peu, et vous arriverez à Chu. Vrai, on dit qu'ici les chiens rongent des cailloux et les poules picorent du gravier.
Et les gens ? Demandez-vous, qu'est-ce qu'ils mangent ? Qu'importe ce qu'on mange, du moment qu'on a le ventre plein. » Après A nos vingt ans, Thiêp nous ramène à travers ce recueil de nouvelles chez ces gens qu'il connaît bien, le petit peuple du Viêt-nam intérieur qui se bat pour sa survie dans un milieu le plus souvent hostile. Et en quelques mots, on y est : on a mal au dos avec la mère sans cesse pliée en deux dans les rizières, on entend l'instituteur qui ânonne, bien incapable de transmettre le goût du savoir à des enfants qui se demandent ce qu'ils mangeront en rentrant à la maison, on rêve avec l'infirme qui a jeté quelques méchants mots sur une feuille de papier à une illusoire célébrité...
Thiêp, avec son mélange de causticité parfois cruelle dans sa description du quotidien et son humanité pleine de tendresse, est sans conteste un écrivain hors du commun.
La fin de la vie et la mort d'un vieil officier qui fut une figure emblématique de la révolution, la malédiction qui poursuit durant cent ans la progéniture mâle d'une lignée, un chasseur qui redécouvre en lui des restes d'humanité en observant une famille de singes... Au fil de ses nouvelles, Thiêp quête chez ses personnages une grandeur d'âme disparue.
"Je m'appelle Khuê. J'ai vingt ans cette année. Et je vais vous dire franchement : personne ne capte rien. Tenez, ma famille, par exemple. J'ai un père, une mère et un grand frère qui sont cons comme leurs pieds. Non, mes parents ne sont pas cons, simplement des parents normaux, voire des parents qui ont réussi dans la vie. [...] Moi, je suis un cas à part. Je vous dirai de but en blanc que des connaissances, j'en ai zéro [...]. Je me demande bien comment j'ai pu faire des études secondaires, passer mon bac et entrer en fac. Même si mes parents ont pratiqué un peu de magie blanche dans les coulisses, cette magie n'a pas donné grand-chose. Mon père est un écrivain célèbre qui, il fut un temps, a été la coqueluche des jeunes générations. Il a toujours su garder l'honneur sauf, j'en suis pas peu fier et lui sais gré de n'avoir jamais rampé devant personne. [...]" D'emblée les personnages et leur histoire sont campés : un père et un fils s'aiment et se déchirent, le fils partant dans une dérive que le père ne peut plus contrôler, sauf peut-être encore par le biais de l'écriture. Un roman terriblement contemporain et pourtant universel, qui confirme, si besoin est, que Thiêp est un immense écrivain.
Un fils accro à la drogue et prêt à toutes les bêtises pour s'en procurer. Un père écrivain, dans le collimateur de la censure de son pays, le Viêt Nam. Une seule solution : le père emmène le fils sur une île loin des sirènes de la ville, pour (re)découvrir les valeurs essentielles de l'existence.
« C'est à travers les yeux d'un jeune garçon que le lecteur découvre le Viêt Nam du xxie siècle débutant, celui d'une jeunesse fascinée par les merveilles du capitalisme triomphant. » Natalie Levisalles, Libération.
« Rimbaud vit à Hanoi. Sa confession offre un éclairage inédit sur l'état d'un pays qui, écartelé entre communisme doctrinal et libéralisme économique, promeut Britney Spears mais refuse toujours de publier ce roman. » Christophe Ono-dit-Biot, Le Point.
« Nguyên Huy Thiêp quitte l'art de l'ellipse et du symbole pour raconter une expérience vécue, celle de la drogue, dans les quartiers chauds de la capitale. » Fabio Gambaro, Le Magazine littéraire.
Nguyên Huy Thiêp vit à Hanoi, où il est né en 1950. Toute son oeuvre est publiée à l'Aube.