Le narrateur écrit des récits de vie. À partir de ce qui reste d'une existence, textes, paroles, images, il comble les trous, les vides, retisse l'écheveau. Il s'est spécialisé dans les récits de personnes parties de morts violentes, en masse. Né à Vienne en 1933, il vit en solitaire, au milieu des livres et de la musique. Seuls les mots lui permettent d'appréhender quelques morceaux du monde. Début 1999, une femme vient le voir. Sa fille Aria a disparu trois ans auparavant, sans laisser d'autres traces que des livres, cassettes, lettres, articles de presse, photographies et carnets datés. Elle avait vingt-quatre ans.
Au fil des rencontres avec la mère et le compagnon et des lectures, une toile chronologique et typographique de l'existence d'Aria se déploie. De Paris à Venise, de Jérusalem en Afghanistan se raconte la vie de la jeune fille. S'écrivent ses failles, son rapport à un monde traversé de fractures, son détachement, à la limite de l'absence, sa nécessité de dire et de raconter le réel, à travers les mots, la possibilité de la littérature. S'écrivent l'échec, le gouffre qui s'ouvre.
L'histoire du narrateur s'inscrit en miroir dans ce récit. Sa plume se mêle à celle d'Aria. Sa propre disparition, qu'il pressent, s'incarne dans les mots, qui seuls resteront, donnant corps aux absents.
La narratrice a soixante-dix ans. Elle est mariée avec un personnage important du gouvernement, et habite dans la zone la plus paisible de la « région ». La nuit elle souffre de terribles insomnies.
Depuis des années, une guerre larvée épuise et divise la population. Chacun vit avec la peur. Les ennemis sont les religieux qui posent des bombes. Il y a quelques mois, une jeune femme, qui travaillait dans une organisation pour la paix, a été tuée dans l'explosion de sa voiture. La narratrice la connaissait bien : sa colère, son engagement, son empathie pour les autres la troublaient beaucoup.
Ne parvenant à l'oublier, elle décide de visiter son assassin en prison. Elle réussit à gagner sa confiance et à le faire parler. Ce qui a tout déclenché, lui avoue-t-il, c'est la mort de son petit frère dans un soulèvement. La pauvreté aussi, l'absence de réparation, surtout. Et la main tendue par les religieux.
La femme rencontre ensuite un écrivain, qui la fascine, et d'autres personnages qui ont marqué la vie de la disparue. Durant son errance la guerre se fait de plus en plus présente. Elle la conduit jusqu'à la ligne de front. Là où elle n'a plus peur.