Drame dans les montagnes du Kurdistan iranien.
Le Kurdistan iranien se situe au Nord-Ouest du pays, le long de la frontière avec l'Irak. C'est une région montagneuse très pauvre et connue pour être un haut lieu du trafic de cigarettes, d'alcool ou de vêtements. Les villageois y sont exploités par des bandes mafieuses pour faire de la contrebande entre les deux pays, à travers les montagnes. Ils empruntent des chemins mortellement dangereux, passant par les sommets de plus de 4 000 mètres des monts Zagros, en portant des marchandises. Ces contrebandiers sont appelés des « kolbars », et chaque année, plusieurs dizaines d'entre eux trouvent la mort, victimes des gardes-frontière iraniens, des mines antipersonnel, d'avalanches ou des rigoureux hivers de cette région.
Dans Les oiseaux de papier, Jalal, dit l'Ingénieur, est recruté pour participer à l'une de ces expéditions en compagnie d'hommes de son village. Une petite troupe est constituée et entreprend le dangereux périple. Un drame se noue alors entre les membres de l'expédition qui meurent un à un.
Cette première fiction de Mana Neyestani est un drame humain saisissant, plein de suspense, qui raconte aussi une histoire de crime d'honneur et le terrible quotidien des habitants de ces régions obligés de prendre des risques insensés pour assurer leur pitance.
Le cauchemar de Mana Neyestani commence en 2006, le jour où il dessine une conversation entre un enfant et un cafard dans le supplément pour enfants d'un hebdomadaire iranien. Le problème est que le cafard dessiné par Mana utilise un mot azéri. Les azéris, un peuple d'origine turc vivant au nord de l'Iran, sont depuis longtemps opprimés par le régime central. Pour certains, le dessin de Mana est la goutte d'eau qui fait déborder le vase et un excellent prétexte pour déclencher une émeute. Le régime de Téhéran a besoin d'un bouc émissaire, ce sera Mana. Lui et l'éditeur du magazine sont emmenés dans la Prison 209, une section non-officielle de la prison d'Evin, sous l'administration de la VEVAK, le Ministère des Renseignements et de la Sécurité Nationale.
Alors que le deux hommes subissent des semaines d'isolement et d'interrogatoires, les azéris organisent de nombreuses manifestations anti-gouvernementales. Les autorités font tirer sur les manifestants, faisant de nombreuses victimes.
Au bout de deux mois de détention, Mana obtient un droit de sortie temporaire. Il décide alors de s'enfuir avec sa femme. Après un long périple qui les fera passer par les Émirats Arabes Unis, La Turquie et la Chine, ils parviendront à atteindre la Malaisie pour s'y installer avant de rejoindre Paris en 2010. Bouleversant, Une Métamorphose iranienne est une plongée en apnée dans le système totalitaire kafkaïen mis en place par le régime iranien.
Mana Neyestani est réfugié en France depuis 2011 après avoir dû s'enfuir d'Iran à cause d'un dessin, des événements qu'il a décrits dans son premier livre, Une Métamorphose Iranienne (çà et là/arte éditions, 2012). Dans Trois Heures, il raconte comment sa condition de réfugié lui pèse, condamné à ne pas pouvoir revenir dans son pays où il risque la prison à vie, tout en ne sentant pas encore chez lui en France.
Cette condition lui a été cruellement rappelée en 2017, au moment où il s'apprêtait à s'envoler pour le Canada pour rendre visite à son frère. Bloqué à l'aéroport par la compagnie aérienne qui ne savait pas comment traiter son titre de voyage de réfugié, Mana Neyestani s'est heurté à un mur d'incompréhension. Trois Heures détaille cette longue attente durant laquelle il ne peut que constater son impuissance et le peu d'attention accordée aux personnes dans sa position.
C'est aussi l'occasion pour cet homme timide qui n'ose jamais élever la voix ou défendre ses intérêts de se livrer à un exercice d'introspection. Un récit poignant, parfois drôle et tout le temps honnête, sur un homme forcé à l'exil mais dont le pays d'accueil le traite encore trop souvent comme un intrus.