L'actualité judiciaire récente et celle des mois à venir (HSBC, Fillon, Cahuzac, Bolloré, Ghosn ou Sarkozy) le confirment si besoin : les transgressions des élites sont monnaie courante. Leur pérennité dans le monde politique et économique suscite des indignations aussi régulières que passagères.
Pierre Lascoumes montre que des facteurs structuraux expliquent cet état de fait. Les élites ont développé une économie morale singulière, à l'écart des normes sociales. Détentrices du pouvoir, elles énoncent des règles générales mais usent de l'autorégulation pour ce qui les concerne. Si nécessaire, un vaste répertoire de justification relativise leurs fautes intentionnelles. Enfin, la faiblesse des sanctions institutionnelles, en particulier judiciaires, assure la robustesse de ce système.
La défiance politique est une spécificité française. Les politistes en mesurent l'extension et l'intensité depuis des années. Mais comment l'expliquer ?
Dans cet essai incisif, Luc Rouban recherche les raisons de la défiance. Analysant les enquêtes du baromètre de la confiance politique, il montre qu'elle trouve sa source dans la question de la reconnaissance sociale et s'épanouit sur les fragilités de la société française. Un nouveau rapport au politique se fait jour où la tentation autoritaire est forte. Car la défiance n'est pas l'indifférence. Ce n'est pas non plus la déception face à des politiques publiques inefficaces ou coûteuses. C'est l'idée que le système politique n'a rien à offrir de bon, qu'il est perverti et mensonger.
Avec La fin des paysans, Henri Mendras avait décrit à la fois l'exode rural et la mutation du paysan vers l'agriculteur. Le paysan est mort ? Vive le chef d'exploitation sur une ferme familiale et mécanisée. Tel a été, depuis les années 1960, le projet politique de nos campagnes. Qu'en est-il aujourd'hui ? Pourquoi ce malêtre des agriculteurs ?
Bertrand Hervieu et François Purseigle montrent ce modèle agricole s'est peu à peu effacé. En 2020, le chef d'exploitation ne représente plus qu'1,6% de la population active. La production est assurée de plus en plus par des salariés ou des sous-traitants, encadrés par des firmes. Dans les espaces ruraux, les agriculteurs, devenus minoritaires, ne portent plus leur vision du territoire.
Le droit est un puissant outil de transformation sociale. En France, le droit de l'égalité des sexes (en particulier au travail) a déjà une longue histoire dans les textes juridiques. Celui de la nondiscrimination est beaucoup plus récent. C'est par le truchement du droit européen et du droit international des droits de l'homme qu'il s'est peu à peu développé.
Issu de cette double tradition, ce droit français de la nondiscrimination fondé sur le genre s'est inspiré du contentieux syndical pour combattre les discriminations systémiques.
Marie Mercat-Bruns montre comment ce modèle singulier permet de penser une lutte contre les discriminations fondées sur d'autres motifs d'exclusion dans l'emploi (race, âge, handicap, notamment). Et qu'il peut défendre, au-delà de l'égalité formelle, une société de l'inclusion