Dans un petit village abandonné de la «zone grise», coincé entre armée ukrainienne et séparatistes prorusses, vivent deux laissés-pour-compte: Sergueïtch et Pachka. Désormais seuls habitants de ce no man's land, ces ennemis d'enfance sont obligés de coopérer pour ne pas sombrer, et cela malgré des points de vue divergents vis-à-vis du conflit. Aux conditions de vie rudimentaires s'ajoute la monotonie des journées d'hiver, animées, pour Sergueïtch, de rêves visionnaires et de souvenirs. Apiculteur dévoué, il croit au pouvoir bénéfique de ses abeilles qui autrefois attirait des clients venus de loin pour dormir sur ses ruches lors de séances d'«apithe´rapie». Le printemps venu, Sergueïtch décide de leur chercher un endroit plus calme. Ayant chargé ses six ruches sur la remorque de sa vieille Tchetviorka, le voilà qui part a` l'aventure. Mais même au milieu des douces prairies fleuries de l'Ukraine de l'ouest et du silence des montagnes de Crimée, l'oeil de Moscou reste grand ouvert...
Kiev, 1919. La ville est tombée aux mains des bolcheviks en février et le nouveau pouvoir s'y met en place tant bien que mal alors que la guerre civile fait rage : la région est en proie à des combats opposant les troupes de l'indépendantiste ukrainien Petlioura, l'armée blanche de Denikine, les anarchistes de Makhno... Samson, jeune étudiant, se retrouve du jour au lendemain à devoir se débrouiller seul après qu'un cosaque a tué son père sous ses yeux et lui a tranché à lui son oreille droite. Il découvre bientôt que celle-ci continue à entendre et lui transmet par moment les bruits qu'elle capte, même à distance. Enrôlé un peu par hasard dans la milice, Samson commence par enquêter sur les deux soldats de l'Armée rouge qu'on lui a imposés comme locataires et qu'il soupçonne de se livrer au brigandage, aidé par une jeune femme, Nadejda, bolchevik convaincue et employée au Bureau des statistiques, dont il ne tarde pas à tomber amoureux. Cette enquête le conduit sur la piste d'autres crimes dont l'instigateur serait un mystérieux Jacobson...
Calcutta, 1921 : Sam Wyndham, policier des forces impériales, se rend selon son habitude dans une fumerie d'opium. Alors qu'il tente d'échapper à une descente de police, il tombe sur un homme sauvagement assassiné, mais, craignant pour sa carrière, il fuit. Chargé d'enquêter sur d'autres victimes aux blessures étrangement similaires, il est convaincu qu'un même meurtrier est à l'oeuvre. C'est alors qu'on le sollicite pour veiller à la sécurité du prince de Galles, en visite officielle en Inde. Les partisans de Gandhi ont en effet organisé une grande marche pacifique, dont la tenue coïnciderait avec l'allocution du prince. Sam est désigné pour convaincre les leaders bengalis d'annuler leur manifestation car son adjoint, le sergent Sat Banerjee, est le neveu de l'un d'entre eux. Contrairement à l'avis familial, ce dernier n'a pas démissionné de la police britannique, et à présent il échoue à convaincre son oncle. Sur fond de manifestations, Sam et Sat découvrent que les victimes des assassinats ont toutes un lien avec un laboratoire de l'armée qui, pendant la Grande Guerre, fabriquait du gaz moutarde testé sur des soldats gurkha, recrutés au Népal, et envoyés en première ligne. Le meurtrier chercherait-il à se venger de ce fait resté jusque-là secret ?
Venu se désintoxiquer de son addiction à l'opium dans un ashram au coeur de l'Assam, le capitaine Wyndham ne pensait pas, entre deux tisanes infâmes, prendre précisément des vacances. Cependant il ne pouvait imaginer qu'en ce mois de février 1922, à l'autre bout de la planète, un fantôme surgi d'un lointain passé londonien reviendrait le hanter. Un de ces sales types croisés du temps où, jeune policier à Scotland Yard, il faisait ses premières armes dans les quartiers populaires de l'est de Londres, là où dockers anglais, immigrés et trafiquants de tout poil ne faisaient pas bon ménage. Mais que peut bien faire cet escroc dans ce coin paumé où on ne trouve pas un whisky convenable à des miles à la ronde?
Deux enquêtes croisées pour dénoncer une même peur de l'étranger à travers une énigme digne des maîtres du genre.
Pour tromper sa solitude, Victor Zolotarev a adopté un pingouin au zoo de Kiev en faillite. L'écrivain au chômage tente d'assurer leur subsistance tandis que l'animal déraciné traîne sa dépression entre la baignoire et le frigidaire vide. Alors, quand le rédacteur en chef d'un grand quotidien propose a` Victor de travailler pour la rubrique nécrologie, celui-ci saute sur l'occasion. Un boulot tranquille et lucratif. Sauf qu'il s'agit de rédiger des notices sur des personnalités... encore en vie. Et qu'un beau jour, ces personnes se mettent à disparaître pour de bon.
Une plongée dans le monde impitoyable et absurde de l'ex-URSS. Un roman culte.
Les amitiés de l'adolescence sont les plus fortes. On échange expériences, secrets et vêtements, tout en se projetant dans un futur rempli d'espoirs. Elisa et Beatrice, les deux héroïnes de ce roman, n'y font pas exception. Elles ont noué un lien fusionnel bien que leurs histoires familiales diffèrent totalement. La première a grandi avec une mère fantasque et indifférente aux apparences, la seconde a été élevée dans le culte du paraître. Leur relation se trouve bouleversée lorsqu'un changement planétaire, Internet, fait irruption dans leur vie. Elisa continuera à faire partie du «monde d'hier», celui des livres et de la culture, tandis que Beatrice se lancera tête baissée dans l'aventure du «monde nouveau», celui des influenceurs et des réseaux. Et ces courants contraires les entraîneront vers des destins opposés.
Un imposteur. Voilà ce qu'est devenu, à son corps défendant, le narrateur de ce roman. Oubliés le père fantasque, tendre et dépensier, la mère austère et impénétrable. Fini le couple parental dysfonctionnel, les disputes, les fins de mois difficiles, les vacances annulées. À présent c'est dans un milieu totalement différent qu'il évolue, sous une autre identité et sous la houlette du providentiel oncle Gianni, ténor du barreau, qui aimerait bien que son protégé tire une croix sur son passé et épouse complètement son mode de vie flamboyant. Et pourtant, toujours, souvenirs et fantômes du passé ressurgissent, tourmentant sa conscience, titillant son sentiment de culpabilité, l'incitant à reparcourir les étapes d'un itinéraire qui a fait de lui ce qu'il est...
Il pleuvait à torrents et personne, vraiment personne, n'était prêt à ouvrir sa porte, et surtout pas à ces individus. Oui, il y avait des Blancs parmi eux - les humanitaires qui les accompagnaient - mais ils étaient tout aussi étranges que les autres malheureux, mal fagotés et mal en point. Que venaient-ils faire, ces envahisseurs, dans notre petit village où il n'y avait plus de maire, plus d'école, où les trains ne passaient plus et où même nos enfants ne voulaient plus venir ? Nous nous demandions comment les affronter, où les abriter puisqu'il le fallait. Eux aussi, les migrants, avaient l'air déboussolés.
C'était pour ce coin perdu de Sardaigne, ce petit village délaissé, qu'ils avaient traversé, au péril de leur vie, la Méditerranée ? C'était ça, l'Europe ?
«Je m'appelle Ben. Une seule syllabe qui en appelle d'autres. Tous mes potes m'appellent Benji. Ma mère m'appelle chéri. Mon père m'appelle rarement. J'ai 14 ans et le quotidien monotone d'un collégien de banlieue. Les cours, quelques galères, et beaucoup d'ennui. Rien d'exceptionnel. Je suis plutôt petit pour mon âge, je n'ai d'envergure que dans mes rêves. Mon corps menu devient celui d'un géant lorsqu'il se pose dans l'Odysseus aux côtés d'Ulysse 31. Rien ne me destine à devenir le leader de la révolution qui va demain embraser la France.».
Entre Belleville et la Brousse, Ben cherche sa place. Il traverse les années 90, les bouleversements du monde et les luttes sociales qui secouent le pays. Un roman combatif et mordant sur les clivages et les failles de notre société, tendre et poétique sur les amitiés indéfectibles et l'amour pour toujours.
1919. La Grande Guerre vient de se terminer en Europe. Après cette parenthèse éprouvante, certains Britanniques espèrent retrouver fortune et grandeur dans les lointains pays de l'Empire, et tout particulièrement en Inde. Ancien de Scotland Yard, le capitaine Wyndham débarque à Calcutta et découvre que la ville possède toutes les qualités requises pour tuer un Britannique: chaleur moite, eau frelatée, insectes pernicieux et surtout, bien plus redoutable, la haine croissante des indigènes envers les colons. Est-ce cette haine qui a conduit à l'assassinat d'un haut fonctionnaire dans une ruelle mal famée, à proximité´ d'un bordel? C'est ce que va tenter de découvrir Wyndham, épaulé par un officier indien, le sergent Banerjee. De fumeries d'opium en villas coloniales, du bureau du vice-gouverneur aux wagons d'un train postal, il lui faudra déployer tout son talent de déduction, et avaler quelques couleuvres, avant de réussir à démêler cet imbroglio infernal.
On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve. Eddy le sait. Pourtant il décide, trente ans après une première descente du Mississippi en canoë, de réitérer l'exploit. Mais cette fois ce n'est pas l'exploit qui l'intéresse. Il n'a rien a` se prouver. Il veut juste prendre la mesure du temps écoulé. Eddy a changé, le fleuve a changé, le pays a changé. Quelque chose flotte dans l'air, prémices d'un changement radical. Descendre le cours mythique du Mississippi, c'est traverser les lieux emblématiques d'un passé plus violent que glorieux, et le regarder en face. S'interroger sur les peuples qui vivaient sur ces terres avant l'arrivée des Européens. Évoquer, au gré des rencontres, les actions humaines, bonnes ou mauvaises, sur le milieu naturel. Mais aussi se laisser porter par le hasard, les flots tantôt calmes, tantôt impétueux, et par le fil de pensées vagabondes.
Échouer a` prévenir l'assassinat d'un prince n'est pas un fait d'armes dont peuvent s'enorgueillir le capitaine Wyndham et le sergent Banerjee, de la police de Calcutta. Piqués au vif par cet échec, l'inspecteur et son adjoint décident de suivre la piste des mystérieuses missives reçues par le prince jusqu'a` Sambalpur, petit royaume de l'Orissa, célèbre pour ses mines de diamants. Le vieux maharajah, entoure´ de ses femmes, et de dizaines de concubines et enfants, paraît très affecte´ par la mort de son fils aîné, et prêt a` accepter leur aide. D'omelettes trop pimentées pour les papilles anglaises au culte de l'étrange dieu Jagannath, en passant par une chasse au tigre a` dos d'éléphant, Wyndham et Banerjee seront initiés aux moeurs locales. Mais il leur sera plus complique´ de pénétrer au coeur du zenana, le harem du maharajah, ou` un certain confinement n'empêche pas toutes sortes de rumeurs de circuler. Au-delà du suspense, une plongée au coeur des petits royaumes de l'Inde traditionnelle des années 1920, et une subtile analyse de l'impossible coexistence entre Britanniques et Indiens.
Paris, 1310, quartier du Marais. Au grand béguinage royal, elles sont des centaines de femmes à vivre, étudier ou travailler comme bon leur semble. Refusant le mariage comme le cloître, les béguines forment une communauté inclassable, mi-religieuse mi-laïque. Ysabel, qui connaît tous les secrets des plantes et des âmes, veille sur les lieux. Mais l'arrivée d'une jeune inconnue trouble leur quiétude. Mutique, rebelle, Maheut la Rousse fuit des noces imposées et la traque d'un inquiétant franciscain... Alors que le spectre de l'hérésie hante le royaume, qu'on s'acharne contre les Templiers et qu'en place de Grève on brûle l'une des leurs pour un manuscrit interdit, les béguines vont devoir se battre.
Les héroïnes solidaires et subversives de ce roman sont résolument actuelles.
C'est à l'ombre de son frère étiqueté « génie » que grandit Verika, la narratrice de ce roman, dans un foyer modeste aux principes saugrenus. Le père, hypocondriaque et obsessionnel, dresse des murs dans le petit appartement familial, tout en veillant anxieusement sur la santé de ses proches. La mère, aussi loufoque qu'envahissante, exerce une surveillance sans faille sur sa progéniture, et tout particulièrement sur le garçon, son préféré. Dans l'étrange normalité de cette famille romaine s'écoulent des journées saturées d'ennui, à l'abri de tout danger. Pour se construire et tenter de devenir une femme, Verika devra se frayer un chemin au milieu des dérives et des névroses familiales, combattre l'ennui et l'étouffant amour parental. Et dégainer la seule arme à sa portée, le rire.
Le légendaire et dérangeant inspecteur Chen est sur la touche. Le Bureau de la réforme du système judiciaire, une voie de garage destinée à l'éloigner des enquêtes trop indiscrètes, pourrait le satisfaire en lui laissant le temps d'écrire un roman inspiré par le célèbre juge Ti. Mais on ne se refait pas, et la tentation d'aller fourrer son nez dans une affaire qui bruisse dans Shanghai-celle mettant en cause une belle courtisane qui ouvre sa table privée aux éminences et aux Gros-Sous de la ville-est plus forte que la sagesse. Tout en s'abritant derrière sa très efficace secrétaire, la jolie Jin, l'inspecteur finit par découvrir que le commerce des antiquités chinoises peut s'avérer extrêmement rentable mais parfois dangereux. Et qu'il vaut mieux ne pas se mettre à dos la Sécurité intérieure et les puissants princes rouges...
Sur le quai de la gare de Perrache, un jour de l'année 1929, une jeune Hongroise, Szonja, a rendez-vous avec son avenir: la France où brillent encore les Années folles et l'usine qui l'a embauchée à la production de viscose. Répondre au désir des femmes d'acquérir ces tissus soyeux à bas prix ne lui fait pas peur. Son rêve, c'était de quitter le dur labeur de paysanne. À Vaulx-en-Velin, dans la cité industrielle, elle accepte la chambre d'internat chez les soeurs, les repas au réfectoire et les dix heures quotidiennes à l'atelier saturé de vapeurs chimiques. Les ouvriers italiens ne font-ils pas de même? Elsa, Bianca, Marco et les autres tiennent les rythmes épuisants, encaissent les brimades des chefs, inhalent les fumées nocives contre de maigres salaires. Cela ne les empêche nullement de danser le dimanche au bord de la Rize.
Dans ces modestes vies d'immigrés, la grande crise fera irruption, amenant chômage, mise à l'écart des étrangers et a rontements avec les ligues. Portée par une inébranlable solidarité et une détermination à vivre, la colère constituera le socle de leur rassemblement, jusqu'à aboutir au Front populaire.
Benjamin Grossmann veut croire qu'il a réussi, qu'il appartient au monde de ceux auxquels rien ne peut arriver, lui qui compte parmi les dirigeants de BeCurrent, une de ces plateformes américaines qui diffusent des séries à des millions d'abonnés. L'imprévu fait pourtant irruption un soir, banalement : son téléphone disparaît dans un bar-tabac de Belleville, au moment où un gamin en survêt le bouscule. Une poursuite s'engage, suivie d'une altercation. Tout pourrait s'arrêter là, mais, le lendemain, une jeune policière assène des coups de pied au corps inanimé du gamin : une vidéo prise à la dérobée par une lycéenne enflamme les réseaux sociaux.
Personne n'en sortira indemne. Ni Benjamin Grossmann, en prise avec une culpabilité grandissante, ni la voleuse d'images, ni la jeune flic, ni les jeunes des cités voisines, ni le prédicateur médiatique. Tous percutés par des logiques fatales : confrontations identitaires, escalades sur les réseaux sociaux et violences émeutières.
Pour que Jim, chau eur Uber de soixante ans, voie la vie du bon côté, que faudrait-il ? De l'argent ? Jim en a su samment. Une petite cure d'antidépresseurs? Non, c'est plus grave, docteur. Ce qu'il veut, c'est qu'on lui che la paix dans ce monde déglingué. Et avoir a aire le moins possible à son prochain, voire pas du tout. Alors, quand sa nouvelle voisine, anquée d'un mari militaire et d'un ls de quatre ans, lui adresse la parole, un grain de sable se glisse dans les rouages bien huilés de sa vie solitaire et réglée. De quoi faire exploser son quota de relations sociales...
En entremêlant les destins de ses personnages dans un roman plein de surprises, Levison donne le meilleur de lui-même, et nous livre sa vision du monde, drôle et désabusée.
Si nous étions en Iran, cette salle d'attente d'hôpital ressemblerait à un caravansérail, songe Kimiâ. Un joyeux foutoir où s'enchaîneraient bavardages, con dences et anecdotes en cascade. Née à Téhéran, exilée à Paris depuis ses dix ans, elle a toujours essayé de tenir à distance son pays, sa culture, sa famille. Mais les djinns échappés du passé la rattrapent pour faire dé ler l'étourdissant diaporama de l'histoire des Sadr sur trois générations : les tribulations des ancêtres, une décennie de révolution politique, les chemins de traverse de l'adolescence, l'ivresse du rock, le sourire voyou d'une bassiste blonde...
Une fresque amboyante sur la mémoire et l'identité; un grand roman sur l'Iran d'hier et la France d'aujourd'hui.
En quête de l'amour idéal, l'héroïne tarde à trouver un mari. À trente ans, déjà considérée comme une vieille fille dans une Sardaigne qui connaît les affres de la Seconde Guerre mondiale, elle finit par épouser un homme taciturne, plus âgé qu'elle, parce que sa famille le lui impose. L'amour n'est pas au rendez-vous. Elle le rencontrera beaucoup plus tard, lorsqu'elle ira sur le Continent faire une cure thermale pour soigner son « mal de pierres », des calculs rénaux. Un rescapé de la guerre, qui souffre du même mal qu'elle, aura raison de son « mal d'amour ». C'est à sa petite-fille qu'elle racontera quelques décennies plus tard ses émotions, ses cheminements, tout en laissant des zones d'ombre. Mais quelle est au juste la vérité ? Elle ne se recomposera que beaucoup plus tard, de façon inattendue, lorsque la dernière pièce du puzzle tombera entre les mains de la narratrice.
« On n'est pas des pédés. » C'est par cette phrase malheureuse que la vie professionnelle de Grégoire Leroy, commandant de police, chef d'une brigade de répression du proxénétisme, se met à vaciller. Il l'a balancée à l'emporte-pièce à une collègue membre de l'association des flics LGBTQI+ parisiens. Grégoire n'a voulu offenser personne, mais le mal est fait, qui lui vaut l'ire de sa hiérarchie : le conseil de discipline se profile à l'horizon pendant qu'il tente de calmer la grogne sociale des prostituées. Mama Prospérité, à la tête de la filière nigériane des Authentic Sisters, a été obligée de casser les prix pour faire face à la nouvelle concurrence : UberPute, un site du Darknet qui livre des prostituées à domicile. Avec l'aide de sa brigade hétéroclite, Grégoire Leroy doit neutraliser les chefs de la plateforme. Une folle tourmente semble s'emparer de tous, de son chef à sa fille, toujours partante pour l'action militante. Un chien névrosé et un mouton philosophe pourraient bien se révéler les meilleurs alliés de ce flic à l'ancienne qui cherche un sens aux mots d'aujourd'hui.
Brick Lane. Dans ce quartier de Londres jeans et parkas se mélangent aux saris et les restaurants indiens proposent des currys aussi parfumés qu'au New Market de Calcutta. Kamil y est serveur depuis peu, mais de serveur, il n'a guère que l'habit, car son âme est celle d'un détective, et son modèle inavoué est Hercule Poirot. Forcé à l'exil par de sombres histoires qui lui ont coûté son poste de policier en Inde, il tente d'oublier cet épisode douloureux dans la chaleur de la famille Chatterjee. Quant a` l'entreprise familiale, le Tandoori Knights, c'est grâce à elle qu'en toute illégalité il sert des bhajis d'oignons aux hipsters de l'East End et du whisky Black Label dans les fêtes bling-bling sur les hauteurs de Hampstead Heath. Là, actrices de Bollywood et businessmen indiens se frôlent parfois d'un peu trop près au bord des piscines. Sur les carreaux glissants un accident est si vite arrivé... Mais de Londres a` Calcutta, la mort a partout le même visage. Alors le serveur de Brick Lane troque son plateau contre sa casquette de détective, déterminé à affronter les fantômes du passé.
En juin 1958, une équipe de tournage française débarque à Rio de Janeiro.
Dans les quartiers pauvres se répand la nouvelle d'un drôle de casting: on recherche de jeunes comédiens amateurs noirs. À sa réécriture du mythe d'Orphée et Eurydice, Aurèle Marquant a l'intention de donner pour cadre une favela vibrante de tragédie et de joie. Le réalisateur a reconnu son Eurydice en Gipsy Dusk, danseuse américaine métisse rencontrée à Paris.
Breno, footballeur brésilien au chômage, sera Orphée; Eva, comédienne martiniquaise, et Norma, Carioca pauvre mais ambitieuse, seront les deux autres visages féminins. Déjà les décors se montent, les acteurs s'apprivoisent et les premières scènes sont tournées sur des airs chantés à la guitare. Cette e ervescence artistique ne passe pas inaperçue: deux agents locaux de la CIA airent un coup à jouer avec la bossa nova, tandis que le lm aiguise les intérêts du Brésil, mais aussi de la France de Malraux, soucieuse de se placer dans la compétition internationale que constitue le festival de Cannes.
La vérité de cette histoire est morcelée, incomplète, inachevée dans le temps et dans l'espace. Elle passe par les colons implantés en Indochine pour y exploiter les terres et les forêts. Par les hévéas transplantés et incisés afin de produire l'indispensable caoutchouc. Par le sang et les larmes versés par les coolies qui saignaient les troncs. Par la guerre appelée «du Vietnam» par les uns et «américaine» par les autres. Par les enfants métis arrachés à Saigon par un aigle volant avant d'être adoptés sur un autre continent. C'est une histoire d'amour qui débute entre deux êtres que tout sépare et se termine entre deux êtres que tout réunit; une histoire de solidarité aussi, qui voit des enfants abandonnés dormir dans des cartons et des salons de manucure fleurir dans le monde entier, tenus par d'anciens boat people.
Avec ce livre, Kim Thúy nous découvre, au-delà des déchirements, l'inoubliable pays en forme de S qu'elle a quitté en 1975 sur un bateau.