Jamais un homme ne s'est autant vu refuser une place dans l'histoire que Charles Plumier. Artisan, dessinateur et graveur, mieux connu pour son oeuvre de botaniste, Plumier a consacré la plus grande partie de sa vie à recueillir et dessiner des plantes et des animaux. Précédant de près d'un siècle les grands naturalistes du dix-huitième siècle dont les descriptions de nombreux nouveaux organismes ont inondé l'Europe à cette époque, le principal mérite de l'apport de Charles Plumier à la botanique et à la zoologie a été attribué à d'autres. Né à Marseille en 1646, Charles Plumier fut d'abord formé par les religieux du Couvent des Minimes aux mathématiques et aux sciences physiques, mais il se tourna rapidement vers l'histoire naturelle, se lançant dans l'étude de la botanique avec un grand enthousiasme. Il impressionna tellement ses supérieurs, tant par ses talents de botaniste que de dessinateur et de graveur qu'il fut engagé, en 1689, comme naturaliste à bord d'une expédition vers les possessions françaises des Antilles pour collecter des spécimens d'histoire naturelle. L'immense succès de son voyage, suivi par deux expéditions aux Antilles, lui assura un revenu à vie et lui valut le titre de Botaniste du roi. Souvent malade et toujours préoccupé par l'édition de son oeuvre, le père Plumier passa les dernières années de sa vie dans la cellule du Couvent des Minimes de la Place royale de Paris à compiler ses notes et ses dessins et à préparer ses manuscrits pour l'édition. Alors qu'il avait entrepris un voyage vers le Pérou pour identifier l'arbre qui produit de la quinine, il fut victime d'une attaque de pleurésie et mourut le 20 novembre 1704 à l'âge de 58 ans. L'héritage de Charles Plumier s'incarne dans un corpus considérable de dessins toujours conservé dans les collections de la Bibliothèque centrale du Muséum national d'Histoire naturelle à Paris. Si ses contributions à la botanique ont été étudiées de façon assez détaillée et un certain nombre de ses dessins de plante ont été publiés, son influence sur la zoologie a été relativement peu explorée et ses dessins zoologiques sont restés largement inédits jusqu'à présent. Cet ouvrage, le premier d'une série de monographies à paraître sur Plumier, a été conçu pour mettre en lumière l'oeuvre exceptionnelle de Plumier et donner une nouvelle vie à des images qui ont été quasiment invisibles depuis plus de trois siècles.
Le présent volume met, pour la première fois, à la disposition d'un large lectorat des reproductions en haute définition des 258 dessins de courges du genre Cucurbita, illustrant une centaine de cultivars, conservés à la Bibliothèque centrale du Muséum national d'Histoire naturelle et réalisés au xviiie siècle par le talentueux Antoine Nicolas Duchesne, du Jardin du Roi à Versailles, un pionnier de la génétique et de l'évolution. Cet ouvrage bilingue anglais-français, rédigé par le Dr Harry Paris, spécialiste reconnu des cucurbitacées, s'adresse certes aux scientifiques (botanistes, généticiens, agronomes, horticulteurs, historiens des sciences) mais aussi à un plus large public incluant les jardiniers, en particulier les amateurs, très nombreux, de plantes cultivées et notamment de cucurbitacées. Son grand format (320 mm x 440 mm), la diversité et la somptuosité des planches et la qualité artistique de la présentation ne manqueront pas d'intéresser les bibliophiles. Ce livre est non seulement la première publication contenant les noms et la classification proposés par Duchesne pour les trois espèces de Cucurbita les plus importantes au plan économique mais il expose aussi le résumé des investigations menées par Duchesne sur ce genre. Les planches sont accompagnées d'extraits appropriés de l'Essai sur l'histoire naturelle des courges de Duchesne avec, par Harry Paris, des commentaires sur les illustrations et une analyse des documents publiés ou inédits relatifs à ces planches. Comme pour ses travaux sur les fraisiers, ici encore l'accent est mis sur la ténacité indéfectible et l'extraordinaire sens de l'observation d'Antoine Nicolas Duchesne, couplés à des idées évolutionnistes originales et prémonitoires.
Les archives des bibliothèques et des muséums à travers le monde sont pleines de trésors peu visibles et sous-évalués mais peu d'objets sont aussi délicats et inconnus que les peintures de poissons et invertébrés réalisées à la fin du xviie siècle par Isaac Johannes Lamotius sur la minuscule île Maurice dans l'océan Indien et aux Moluques. Seul et coupé de la vie intellectuelle hollandaise de l'époque, accablé par la tâche quasi impossible de gouverner une petite mais indisciplinée communauté de colons hollandais, Lamotius se consola en étudiant la faune et la flore alors inconnues de l'île. Durant son mandat, et quelque temps après quand il fut exilé sur l'île de Rosengain dans l'archipel de Banda, il consacra ses temps libres à dessiner et peindre des animaux aquatiques, en particulier des poissons marins. Bien qu'il en produisit sans doute beaucoup plus, il ne reste plus aujourd'hui qu'un jeu de 250 planches en couleurs dont la totalité est reproduite pour la première fois dans le présent volume. Les planches révélées ici, conservées dans le fonds de la Bibliothèque centrale du Muséum national d'Histoire naturelle de Paris, ont été dévoilées par Georges Cuvier au début du xixe siècle. Ce n'est qu'en 1959 que l'un des auteurs, procédant à une étude comparative détaillée de ces planches et d'autres jeux d'illustrations semblables sur lesquels s'appuyaient de nombreuses publications d'histoire naturelle du xviiie siècle, les identifia comme réalisées par Lamotius. Ces dessins sont largement supérieurs à tout ce qui se faisait à la même époque. Ils fournissent la première preuve de l'existence de beaucoup des espèces figurées, avec des données sur leur collecte?; la fidélité scientifique est telle que presque toutes ces espèces peuvent être aisément identifiées. Ensemble, ces planches constituent la description la plus ancienne connue de la faune marine de l'île Maurice et, en cela, une des plus anciennes études des poissons et invertébrés marins de tout l'Indo-Ouest Pacifique. Accompagnées de commentaires scientifiques et historiques, ces images renaissent après avoir été perdues de vue par le public durant plus de trois siècles.
Chercheur passionné et naturaliste accompli, Alcide Dessalines d'Orbigny (1802-1857) a laissé une oeuvre prestigieuse et féconde dont le caractère exceptionnel, par son ampleur, ses implications dans la science actuelle et la diversité des sujets abordés, ne laisse pas d'étonner scientifiques et historiens. En présentant son premier travail sur les foraminifères (microorganismes unicellulaires, pourvus d'une coquille capable de se fossiliser), il signait l'acte de naissance de la Micropaléontologie, sans soupçonner l'importance qu'elle prendrait ensuite dans le concert des géosciences, notamment en Paléocéanographie et Paléoclimatologie, et dans le développement de la recherche pétrolière ou encore des travaux d'aménagement du territoire, tel le creusement du Tunnel sous la Manche. Les planches de foraminifères dessinés par d'Orbigny concrétisaient plusieurs années d'observation?; elles étaient destinées à l'illustration de son travail fondateur sur les foraminifères, mais restèrent inédites bien que devenues une référence incontournable pour de nombreux chercheurs. D'une grande qualité, elles témoignent des dons d'observation de leur auteur et de ses talents artistiques. Il importait donc de les publier. Elles sont reproduites dans ce volume et analysées par Marie-Thérèse Vénec-Peyré qui retrace leur histoire, replace les espèces dans le contexte scientifique actuel et fait le point sur le matériel type conservé dans les collections de Micropaléontologie du Muséum national d'Histoire naturelle. Spécialisée dans l'étude des foraminifères actuels et fossiles, Marie-Thérèse Vénec-Peyré, étudie en particulier le témoignage apporté par ces microorganismes sur les environnements du passé. Directeur de recherche au Centre national de la Recherche scientifique, elle effectue ses travaux dans le Département Histoire de la Terre du Muséum national d'Histoire naturelle au sein de l'Unité Mixte de Recherche 5143 (CNRS - MNHN - Université Pierre et Marie Curie), Paléobiodiversité et Paléoenvironnements. Ses fonctions de chargée de conservation des collections de Micropaléontologie du MNHN la désignaient naturellement pour la rédaction de cet ouvrage. Elle s'inscrit dans la continuité de la tradition micropaléontologique au Muséum, initiée par Alcide d'Orbigny, fondateur de la Micropaléontologie et premier titulaire de la Chaire de Paléontologie au MNHN.
Remarquable jardinier du XVIIIe siècle, éminent spécialiste des fraisiers, correspondant des plus grands naturalistes de son temps, Antoine Nicolas Duchesne était en outre un talentueux dessinateur. Esprit curieux et soucieux d'observer et d'expliquer la diversité biologique, évolutionniste et généticien avant l'heure, il ne se contentait pas de cultiver ses plantes, il étudiait leur biologie, les croisait, expérimentant en permanence à cette frontière, floue à l'époque, entre variété et espèce. Ses observations, qui ont attiré l'attention de Darwin, n'étaient pas simplement consignées mais faisaient, de sa main, l'objet d'illustrations précises et détaillées. Les planches ainsi réalisées sur les fraisiers constituent une référence essentielle, incontournable. Il importait donc de publier les oeuvres de ce précurseur de méthodes et d'idées qui allaient se développer au siècle suivant et révolutionner non seulement la botanique mais aussi les conceptions de l'organisation et du fonctionnement du monde vivant. Le présent volume rend enfin accessibles les planches inédites, conservées à la bibliothèque centrale du Muséum national d'Histoire naturelle, de ce précurseur, de ce «?jardinier cultivateur?» comme il aimait se qualifier, de cet inspirateur des «?naturalistes profonds?» avec lesquels il n'hésitait pas à entretenir parfois des controverses scientifiques. Les dessins de Duchesne figurent avec ses commentaires d'époque et ceux, actuels, de l'auteur du volume, le Professeur Günter Staudt.
Les documents manuscrits de la famille des Jussieu, professeurs de botanique au Jardin du Roy puis au Muséum d'histoire naturelle (1710-1853) ont été acquis en 1858 par le Muséum après la mort d'Adrien de Jussieu. Conservés à la Bibliothèque centrale du Muséum ils forment un fonds riche d'informations pour l'histoire des sciences, particulièrement celle du Jardin et celle de la Botanique.
Parmi les plus anciens, se trouve un portefeuille contenant 98 dessins de champignons (en couleur), réalisés vers 1730, par Claude Aubriet (c. 1665-1742) sous la direction d'Antoine de Jussieu (1686-1758). Claude Aubriet, peintre miniaturiste au Jardin du Roy, est connu pour la réalisation des illustrations des Elémens de botanique que publie Joseph Pitton de Tournefort (1656-1708) en 1694. Ces dessins sont loués pour leur précision par Carl von Linné lui-même.
Les dessins de champignons par Aubriet furent exécutés à une période « clé » dans l'histoire de la mycologie, puisqu'en 1729, Pier Antonio Micheli publie dans son ouvrage fondamental (Nova plantarum genera) une étude précise des champignons, accompagnée d'excellentes gravures en noir et blanc.
Les réalisations d'Aubriet, souvent soignées et fidèles aux modèles, sont précieuses car les représentations en couleurs de champignons sont rarissimes avant la fin du xviiie siècle. Elles témoignent en outre du regard que l'on portait alors sur ces cryptogames, qui apparaissaient bien mystérieux du point de vue de leur organisation, de leur reproduction et, pour tout dire, de leur « existence » même.
Cette publication intéressera vivement les mycologues et contribuera à faire connaître Claude Aubriet. En outre, elle souligne le rôle décisif que les illustrateurs scientifiques ont toujours joué au cours de l'histoire.
Docteur en Histoire et Philosophie des sciences (École des Hautes Études en Sciences Sociales), Xavier Carteret a étudié les travaux du naturaliste Michel Adanson (1727-1806) et l'histoire des classifications botaniques jusqu'à la fin du xviiie siècle. Il est également connu dans le domaine de la mycologie et de l'illustration mycologique.
Docteur en Histoire de l'art moderne, Aline Hamonou-Mahieu a étudié pendant près de dix ans les collections de dessins et de vélins d'histoire naturelle de Claude Aubriet au Muséum national d'Histoire naturelle de Paris, à la Royal Horticultural Society et au Natural History Museum à Londres. Successivement employée par les Ministères de la Culture, de l'Enseignement et de la Recherche, de l'Éducation nationale, Aline Hamonou- Mahieu a écrit de nombreux articles pour des revues d'histoire de l'art et des sciences.
The handwritten documents of the Jussieu's, professors of botany at the Jardin du Roy and subsequently at the Muséum d'Histoire Naturelle from 1710 until 1853, were acquired by the Muséum in 1858 after the death of Adrien de Jussieu. Kept in the main library of the Muséum, these collections constitute a rich source of information for the study of the history of natural sciences, in particular the history of the garden and of botany.
The oldest documents include, e. g., a folder containing 98 colour plates of mushrooms prepared around 1730 by Claude Aubriet (ca. 1665-1742) under the direction of Antoine de Jussieu (1686-1758). Claude Aubriet, painter and miniaturist at the Jardin du Roy, is known for his illustrations in the Elémens de botanique published by Joseph Pitton de Tournefort (1656-1708) in 1694. Because of their quality, these plates have been used, e. g., by Linnaeus.
These mushroom paintings were prepared in a key period in the history of mycology when Pier Antonio Micheli published in his fundamental work (Nova plantarum genera, 1729) a fine study on the fungi, accompanied by excellent engravings in black and white.
The artwork of Aubriet, usually carefully done and clearly depicting the species, is precious because colour illustrations of mushrooms dating from before the end of the 18th century are very rare. They also reflect the lack of understanding at that time of the cryptogams, whose structure, reproduction, and existence in general, remained mysterious.
The present publication will be of considerably interest to mycologists and will contribute to our acquaintance with Claude Aubriet. Moreover, it will underline the decisive role that scientific illustrations have played in the course of history.
Xavier Carteret, doctor in history and philosophy of sciences at the École des Hautes Études en Sciences Sociales, has studied the work of the naturalist Michel Adanson (1727-1806) and the history of botanical classifications until the end of the 18th century. He is also known in the field of mycology and mycological illustration.
Aline Hamonou-Mahieu, doctor of modern art history, has studied during almost ten years the collections of natural history painting and vellums of Claude Aubriet at the Muséum national d'Histoire Naturelle of Paris, and at the Royal Horticultural Society and Natural History Museum in London. Employed, successively, by the Ministères de la Culture, de l'Enseignement et de la Recherche, de l'Education nationale, Aline Hamonou-Mahieu has written numerous articles in journals on the history of art and natural sciences.